Avancées dans la reconnaissance du « mariage forcé » en tant que crime contre l’humanité – Dossier 002/02, CETC

Avancées dans la reconnaissance du « mariage forcé » en tant que crime contre l’humanité – Dossier 002/02, CETC

par Annie Bunting

Les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (CETC) ont rendu leur décision très attendue dans le procès de deux commandants des Khmers rouges, Nuon Chea et Khieu Samphan, le 16 novembre 2018 – dossier 002/02.  Si les CETC n’ont publié qu’un résumé de leur jugement – 40 pages – avant d’en publier la version intégrale, celui-ci contient leur verdict et leur raisonnement historiques.  En premier lieu, la Chambre a déclaré les deux accusés coupables de génocide contre les Chams et les Vietnamiens pendant la période du Kampuchéa démocratique (para. 26).  En deuxième lieu, les CTEC ont déclaré les accusés coupables de crime contre l’humanité et d’autres actes inhumains ayant pris la forme de mariages forcés et de viols dans le contexte des mariages forcés.

Nuon Chea et Khieu Samphan ont été déclarés responsables d’une politique nationale visant à forcer les couples à se marier et à avoir des enfants, dans le cadre de la stratégie de croissance démographique des Khmers rouges (para. 39).  Des avocats des parties civiles ont représenté plusieurs victimes de mariage forcé sous le régime des Khmers rouges devant les CETC. Le projet ECtG a présenté un mémoire d’amicus curiae au sujet de la classification juridique des pratiques de mariage forcé s’appuyant sur un précédent juridique et sur les recherches qualitatives menées par des partenaires.

Il s’agit là d’une nouvelle avancée dans le droit pénal international et qui est importante pour notre partenariat.  Les CETC ont adopté une position qui rejoint celle que nous avons fait valoir dans le mémoire d’amicus curiae du projet ECtG, à savoir que le droit international s’appliquait aux actes commis dans les années 1970 et que les accusés auraient dû savoir qu’ils contrevenaient au droit international. De plus, les CETC ont rejeté l’argument selon lequel cette politique s’apparentait aux mariages arrangés en temps de paix; en visant à « se substituer aux parents » et à la famille,  le régime oppressif était plutôt coupable de crime contre l’humanité.  C’est aussi un des arguments que nous avons avancés dans le mémoire d’amicus curiae du projet ECtG.  Lorsqu’elle sera publiée, la version intégrale de la décision se trouvera sur le site Web des CETC.  Vous trouverez un bref commentaire (en anglais) de Rosemary Grey sur l’aspect genre dans son billet de blog.